Dentelle

Dentelle, elle a en elle des pensées de fleurs, des motifs de réflexion, des atours, un vrai chemin de femmes, histoires anciennes, mythiques, de rites et de savoirs, ma mère était bretonne, chaque souvenir est un point, une arabesque, un motif, un collage de transparence, ainsi va la dentelle de la mémoire, partir en …
Les trois points … de L-F. Céline avaient à voir avec le métier de sa mère, dentellière (sic), le texte en trois points, l’écriture ressemble aussi à un tricot, une tapisserie, une passoire, on évide, on fait de l’air, on est au bout des doigts.
J’ai commencé par faire des trous, on disait à trou-trou, des trou-trous, ainsi passait la couleur, la lumière aussi, la construction de l’air et comme dentelle ni dessous, ni dessus.
On disait des métaphores, elle file des métaphores comme on fait des dentelles.
Maintenant quand je fais des lumières, je travaille en tout petit, en fin, en délié.
La dentelle a un centre, un trou noir, comme araignée, elle file, je choisis les napperons, ceux posés sous les vases, les portraits sur les meubles, ils sont circulaires.
Mémoire des trous ronds et vides, comme analogies.
Ce sont des liens de mémoires, l’enfance et les fleurs, fleurs fanées des souvenirs comme l’œillet de Nice, l’anémone du vase posé sur le napperon, la violette, les roses séchées gardées, les mimosas mimesis, encore des empreintes de mots dessinant une fragilité palpitante des yeux.

Anne-Marie Pécheur 2004